Stratégie supply

Clarins : « Nous avons réorganisé notre logistique e-commerce européenne »


Georges Peyrot est le directeur logistique de Clarins, leader des produits cosmétiques. Ces deux dernières années, le groupe français a procédé à une réorganisation de sa logistique e-commerce afin d’assurer une meilleure proximité avec ses clients finaux.

Georges Peyrot, directeur logistique de Clarins. - © D.R.
Georges Peyrot, directeur logistique de Clarins. - © D.R.

Pouvez-vous nous présenter rapidement Clarins ?

Clarins a été fondée en 1954 par Jacques Courtin à Neuilly, en région parisienne. À l’époque, il possédait un salon de beauté. Il a été un précurseur dans la relation client : il attachait une grande importance au retour de ses clientes, leur demandant systématiquement ce qui pouvait être amélioré dans son service. Je vous raconte cela, car vous verrez, cela a une grande importance pour la suite.

Aujourd’hui, le groupe compte environ 8 000 salariés et est présent dans plus de 150 pays, avec une vingtaine de filiales à travers le monde. Le chiffre d’affaires avoisine les 2 milliards d’euros. Clarins est le leader européen des produits de soin et de maquillage premium. Nous avons une usine historique à Pontoise, où sont fabriqués 95 % des produits Clarins, ainsi qu’une usine plus récente à Sainte-Savine, près de Troyes. Les productions - qu’elles proviennent des usines ou des sous-traitants - sont centralisées à Amiens dans un entrepôt historique, créé il y a 25 ans. Sur 30 000 m², il permet de stocker jusqu’à 27 500 palettes et emploie 115 personnes.

Un projet nommé Perseus visant à refondre le schéma logistique international du groupe

Vous êtes arrivé chez Clarins il y a trois ans au poste de directeur logistique, après 35 ans de carrière dans la logistique, notamment dans la distribution de livres, les fournitures de bureau, le secteur pharmaceutique…

Tout à fait. J’ai été recruté, à la suite de l’ancienne directrice logistique, avec comme mission immédiate de mettre en place un nouvel outil, dans le cadre d’un projet nommé Perseus visant à refondre le schéma logistique international du groupe.

De quoi s’agit-il ?

Avant Perseus, la logistique européenne reposait des entrepôts prestés. Toute la logistique e-commerce européenne était ainsi sous-traitée à un prestataire en Belgique. L’objectif de Perseus consistait à reprendre la main sur les commandes en ligne afin de nous rapprocher de nos clients finaux, revenir à ce lien fort qu’avait construit Jacques Courtin avec ses clients.

il a été décidé de remodeler le schéma logistique européen de façon à ce qu’on réussise à livrer en 24 à 48 heures

Il s’agissait d’une volonté forte de notre direction générale : développer le marché e-commerce notamment en rapprochant nos entrepôts de nos clients finaux. Pour ce faire, il a été décidé de remodeler le schéma logistique européen de façon à ce qu’on réussise à livrer en 24 à 48 heures l’ensemble des clients européens contre J+4 à J+5 auparavant dans certains cas.

Concrètement, cela s’est traduit par une reprise du fret e-commerce par notre entrepôt historique d’Amiens, pour la France, le Benelux, l’Allemagne et l’Autriche, alors que celui-ci gérait uniquement, jusqu’ici, le B2B, le grand export et l’approvisionnement des autres hubs logistiques. En parallèle, deux entrepôts ont été mis en place (par des prestataires) à Milan et Madrid pour l’Europe du Sud. Ces deux entrepôts sont capables de livrer en moins de 48 heures l’ensemble de leur zone. Et les destinations les plus lointaines d’Amiens, en Autriche, sont au maximum à J+3. L’essentiel de cette nouvelle organisation est opérationnel depuis novembre 2023.

Comment avez-vous adapté votre entrepôt d’Amiens, qui n’était donc pas équipé pour traiter des commandes e-commerce ?

Nous avons d’abord fait appel à un cabinet spécialisé, Diagma. Il nous a été préconisé de mettre en œuvre une solution « Goods to person ». C’est dans ce cadre que nous avons retenu la solution Scallog. Ce nouveau dispositif a été implanté sur une surface de 4 500 m². Il comprend 749 étagères, 71 robots et 14 stations (12 de préparation et 2 de réapprovisionnement). Quatre stations sont dédiées au e-commerce et le reste au B2B.

Cet outil, qui représente un investissement de deux millions d’euros environ, a permis de doubler notre productivité

Cet outil, qui représente un investissement de deux millions d’euros environ, a permis de doubler notre productivité : nous sommes passés de 90 lignes de commandes préparées par heure et par personne à 180… Aujourd’hui, nous préparons en moyenne 1 500 à 2 000 commandes par jour, et jusqu’à 5 000 lors des pics comme le Black Friday. L’activité e-commerce représente désormais 45 % à 50 % du total des commandes traitées à Amiens, contre zéro il y a trois ans puisqu’avant le projet Perseus, le site d’Amiens n’était pas du tout positionné sur le e-commerce.

Un retour sur le déploiement de cet outil en lui-même ?

La mise en place a été rapide, avec une mise en route en deux phases : la première tranche a démarré le 6 février 2023, la seconde le 6 mai 2023. L’interface est assez intuitive, la prise en main par les équipes a donc été assez rapide.

Comment les équipes ont-elles accueillies cette nouvelle organisation ?

Extrêmement bien. Je n’ai perçu aucune résistance au changement. Je dois dire que le niveau d’engagement des collaborateurs est assez remarquable chez Clarins. Cet entrepôt date de 25 ans et j’ai de nombreux collaborateurs qui affichent une ancienneté de plus de 20 ans ! Clarins le leur rend bien, le groupe vient d’obtenir la certification B-Corp. Cette automatisation n’a supprimé aucun poste, au contraire, la réorganisation a permis d’amener davantage de travail à Amiens.

Aujourd’hui, plus de 90 % des commandes e-commerce sont expédiées en moins de 24 heures

Quelles sont les prochaines étapes, vos priorités désormais ?

Continuer à gagner en efficience et réduire les délais de traitement. Aujourd’hui, plus de 90 % des commandes e-commerce sont expédiées en moins de 24 heures (sauf en période de pics de commandes), mais nous pouvons toujours progresser. Ce que je souhaite pour l’avenir ? Que le e-commerce se développe encore afin d’avoir encore plus d’activité à Amiens. Nous sommes prêts : l’outil Scallog nous permettra de nous adapter à une montée en puissance et nous pouvons passer sur trois équipes de travail sur la journée, au lieu de deux actuellement.