Stratégie supply

Bjorg : « Le directeur général est propriétaire du processus S&OP »

Par Guillaume Trecan | Le | Industrie

Jean-Ferreol Ruph, directeur supply chain France du groupe Ecotone, en charge de la supply des marques Bjorg et Bonneterre, revient sur le chemin qui l’a conduit à mettre en place une supply structurée et agile capable d’absorber la forte variabilité du marché du bio. Un parcours consacré par une certification Supply Chain + accordée à son organisation.

Jean-Ferréol Ruph, directeur supply chain France d’Ecotone. - © D.R.
Jean-Ferréol Ruph, directeur supply chain France d’Ecotone. - © D.R.

Que représente la supply chain de Bjorg et Compagnie ?

Bjorg et Compagnie est une business unit (BU) qui représente environ 50 % du chiffre d’affaires du groupe Ecotone (700 millions d’euros). Ecotone est un groupe français basé à Lyon, et entreprise à mission qui a pour but de « Nourrir la Biodiversité ». La supply chain de Bjorg et Compagnie compte un peu plus d’une trentaine de personnes, et couvre six métiers : les prévisions de vente, le supply planning, les master datas, le service clients et l’animation logistique et transport. Notre schéma de flux logistique s’appuie sur un seul entrepôt d’un peu plus de 30 000 m2 situé à Saint-Quentin-Fallavier. Nos produits sont fabriqués pour moitié dans neuf usines du groupe et l’autre moitié avec environ 150 fournisseurs externes que nous animons.

Qu’est-ce cela représente en termes de volume ?

Nous gérons près de 1 000 SKU - 700 standards et 300 de promotions - et nous livrons 300 000 palettes par an.

Quels sont les enjeux de la supply chain en termes de performance opérationnelle et commerciale ?

Assez classiquement dans l’alimentaire, nous sommes attendus sur le meilleur taux de service pour le moins cher possible. Avec un portefeuille aussi large que le nôtre, qui fait appel à des technologies très différentes et comprend principalement des produits bios, maintenir la qualité de services sur l’ensemble de nos références est un véritable défi. Pouvoir se concentrer sur les nombreuses exceptions que nous sommes susceptibles de rencontrer chez nos fournisseurs, implique à la fois des process et de l’agilité. Dernièrement, nous avons successivement dû gérer les défis de la croissance, les perturbations du Covid et d’importantes variations de ventes en sortie de Covid.

Comment organisez-vous cette agilité ?

Pour structurer notre agilité, nous alimentons notre S&OP avec un cycle mensuel. Le directeur général est propriétaire du processus S&OP, ainsi que chacun des membres du codir aux différentes étapes ; le Marketing au niveau de la gestion du portefeuille, le Commerce pour la gestion de la demande, la Supply Chain pour la gestion de la supply, la Finance et la direction générale pour la réconciliation de l’ensemble. Dernièrement, pour répondre aux situations qui exigent des prises de décisions rapides, nous avons appris à appliquer ce processus en une semaine ou en deux heures sur une gamme restreinte de références qui nécessitaient un arbitrage rapide. Ce Fast S&OP est aussi possible parce que le processus S&OP - introduit en 2016 - est bien connu au sein de l’entreprise. Nous sommes en train d’en finaliser la structuration, de le customiser et de le marketer pour qu’il parle à tout le monde et pas seulement à la Supply Chain.

En quoi consiste cette démarche de marketage du processus de Fast S&OP ?

Au sein de la supply, nous avons conçu des fiches qui documentent chaque étape de nos process pour ne pas être dépendants de la seule connaissance des personnes en place. Nous mettons à jour ces fiches chaque année et elles nous servent aussi à faire connaître les grands principes des process supply chain aux autres directions. Nous sommes en train de concevoir la fiche du Fast S&OP.

Comme tout process, il peut paraître un peu aride. Pour le populariser, nous faisons donc aussi en sorte qu’il soit personnalisé. La Demande Planning Manager et la Supply Planning Manager sont à ce titre deux personnes très importantes pour incarner le S&OP. Nous avons à ce titre un exemple frappant. En sortie de Covid, il était difficile de projeter les ventes, et logiquement nous avions un souci de biais. Alors nous avons lancé un programme baptisé « Kill Bias » sur lequel tout l’entreprise s’est engagée, et notamment la Direction Générale. Quand ce programme a porté ses fruits et que le biais est revenu dans la norme attendue, le DG est venu déguisé en Kill Bill en S&OP. Une anecdote qui a vraiment marqué les esprits et contribué à populariser le process S&OP au-delà de la supply.

A quelle fréquence mobilisez-vous ce processus Fast S&OP ?

Nous l’utilisons trois fois par an en moyenne. Nous avons fixé des règles pour solliciter le Codir à bon escient. Et surtout, l’état d’esprit de ce Fast S&OP inspire la manière dont toutes les équipes commerciales, marketing, achat et supply-chain collaborent ensemble dans la prise de décision.

Avec quels outils digitaux travaillez-vous ?

Nous travaillons avec un outil de Demand Planning, DSCP (Digital Supply Chain Planning) de DynaSis depuis quatre ans et avec SAP pour le Supply Planning.

Vous avez obtenu en mars dernier une certification de l’association Supply Chain+ pour votre organisation achats. Quelle était votre motivation ?

J’ai découvert le référentiel sur internet et j’ai adhéré à cette manière d’évaluer une supply chain. J’ai donc proposé à l’équipe de passer cette certification parce qu’elle est pertinente sur le fond et qu’elle avait du sens dans l’histoire de notre supply chain. La création de la supply chain de Bjorg et Compagnie a débuté en 2010, et environ la moitié de l’équipe y travaille depuis le début. Il était important de faire appel à un regard extérieur pour reconnaître ce travail de construction et le formidable investissement de toutes les équipes sur ces dix dernières années. C’était aussi un moyen de benchmarker nos feuilles de routes que nous écrivons pour les cinq ans à venir.

Enfin, c’est un moyen d’ouvrir la supply chain vers l’extérieur. Nous avons terminé cette première phase de construction, à nous de démarrer la suivante pour continuer de grandir. Cette certification nous honore autant qu’elle nous oblige pour les prochaines années !

Quels sont les points forts et les points faibles qu’a fait ressortir le diagnostic de Supply Chain + ?

Notre supply chain a été jugée « fiable », « efficiente », « agile » et « structurée ». Cela se vérifie dans l’organisation de nos équipes, dans notre mode de management, dans l’animation de la performance, dans la structuration et l’animation de nos process et enfin dans la qualité de nos résultats.

A l’inverse, nous devons développer son caractère « connecté ». Nous sommes en EDI avec nos clients mais pas encore avec nos fournisseurs. Nous avons encore une grande marge de progression sur la digitalisation de la supply-chain. Ce qui pourra aussi nous aider à renforcer les dimensions « résilient » et » préventif », critiques pour une entreprise comme la nôtre qui commercialise un large portefeuille de produits.

Présentation du référentiel Supply Chain + à Paris

Dans le cadre des journées de l’association Supply Chain +, une présentation du label Supply Chain + est organisée le 21 septembre à La Défense. Label Supply Chain Plus (label-supplychain-plus.com)