Solutions et techno

Dior Parfums : « Des solutions simples et standards pour gagner en agilité »

Par Guillaume Trecan | Le | It

François Maes, directeur de projet SI Supply Chain de Dior Parfums, explique les enjeux du projet de refonte des systèmes d’information qu’il pilote autour d’un nouveau S&OP étendu à Dior, Guerlain et Givenchy, d’un portail fournisseurs (Connective IT) et d’une solution APS. Objectif : moins de temps à collecter de la data et plus de temps à l’analyser.

François Maes, directeur de projet SI Supply Chain. - © D.R.
François Maes, directeur de projet SI Supply Chain. - © D.R.

Pourquoi avez-vous entrepris une remise à plat de vos systèmes d’information supply chain en 2019 ?

A l’heure de passer à la nouvelle version de SAP, S4Hana, nous en avons profité pour repenser beaucoup de processus. Depuis la mise en place de SAP en 2001, l’ensemble du périmètre applicatif Opération et Supply Chain a connu beaucoup trop de développements spécifiques. Aujourd’hui, quand nous faisons évoluer nos SI, nous sommes obligés de vérifier que cela ne provoquera pas d’effets de bord qui nous pénaliseront par ailleurs. Lorsque nous avons relancé le projet après 18 mois d’arrêt dus au Covid, en 2021, j’ai choisi pour résumer la démarche une phrase d’accroche de Francis Blanche : « mieux vaut penser le changement que changer le pansement ».

Il faut imposer au métier de prendre de la hauteur pour réfléchir à la manière de travailler avec une solution standardisée

Nous devons corriger le décalage de nos SI avec nos enjeux business à cinq niveaux : capacité de simulation pour envisager différents scénarii dans un marché en constante évolution ; capacité à suivre les évolutions réglementaires ; besoin d’agilité pour répondre à une demande très volatile ; adaptation aux évolutions de nos modes de distribution ; besoin de processus métiers et de SI simples et compréhensibles. Il faut imposer au métier de prendre de la hauteur pour réfléchir à la manière de travailler avec une solution standardisée.

Qu’avez-vous priorisé ?

Nous avons pointé trois projets prioritaires : un S&OP, un portail collaboratif fournisseur pour gérer les approvisionnements et un projet d’APS avec trois briques : prévision, planification, distribution.

Où en êtes-vous actuellement ?

Nous avons d’abord travaillé sur le S&OP pour capter des informations marketing, financières et commerciales afin de pouvoir collaborer avec les Opérations autour d’une vision partagée. Nous avons modernisé le S&OP qui existait chez Guerlain depuis plusieurs années et d’octobre 2021 à avril 2022, nous l’avons étendu à Dior et Givenchy. Le portail collaboratif fournisseurs, Connective IT, est live depuis mi-avril. Concernant la solution APS, nous sommes en phase de précadrage pour choisir nos scénarii. Nous n’avons pas encore défini si nous allions utiliser une solution agile, un best of breed disponible sur le marché ou un mix des deux. Mais, dans la partie prévision de ventes, nous sommes convaincus de la nécessité d’utiliser de l’intelligence artificielle.

Quelle a été la dimension conduite du changement dans ces projets ?

Je milite pour disposer de ressources et de moyens afin d’accompagner le métier en termes de communication, d’analyse des impacts organisationnels, de définition des rôles en mode projet et post-projet. Nous avons mis en place une cellule d’accompagnement du changement qui nous aide sur tous ces volets. Nous sommes accompagnés par le cabinet Bartle, qui nous aide à structurer notre démarche, à communiquer, à organiser des webinaires et des formations.

Le métier est à 200 % d’accord pour changer les systèmes d’information… ce qui ne veut pas dire qu’il a beaucoup de temps à y consacrer

Quels sont les points critiques dans la réussite de ces projets d’implémentation ?

Le métier est à 200 % d’accord pour changer les systèmes d’information… ce qui ne veut pas dire qu’il a beaucoup de temps à y consacrer. Il est notamment crucial d’avoir les bonnes personnes disponibles en amont du projet, dans la définition de la cible. En mode projet, le métier doit être disponible pour participer à la conception, à la réalisation, aux tests utilisateur et à la formation. En mode run, nous devons garantir que le business process owner et les utilisateurs clefs vont rester disponibles et être capables de consacrer 20 % de leur temps à ce rôle dans la durée.

Les managers du groupe sont-ils conscients de l’importance d’investir des ressources dans ces projets ?

Dégager des ressources supplémentaires n’est pas une décision simple pour le président d’une maison. Au-delà du ROI, nous avons un enjeu plus important, le risque de l’inaction. La non-convergence des façons de travailler entre les différentes usines d’une même maison représente ainsi une déperdition d’énergie énorme. Le but de ces développements sur nos SI est de dégager du temps sur des tâches sans valeur ajoutée pour que tous nos collaborateurs - du gestionnaire au cadre supérieur - aient plus de temps à consacrer à améliorer le business. Lorsque je pilotais la logistique de Givenchy, il y a quatre ans, je consacrais 80 % de mon temps à gérer la data et à collectionner des informations et 20 % à les analyser. Les outils de business intelligence dont nous disposons aujourd’hui peuvent nous permettre d’inverser la tendance.

Plus que d’intelligence artificielle, ce qu’il nous faut, ce sont des outils capables de faciliter l’accès à l’information que nous devons traiter en priorité

Nous devons disposer de solutions simples et standards pour gagner en agilité et faire face à des contraintes croissantes. Plus que d’intelligence artificielle, ce qu’il nous faut, ce sont des outils capables de faciliter l’accès à l’information que nous devons traiter en priorité. Nous nous orientons de plus en plus vers un travail par exception. Les outils que nous déployons nous permettront de faire la différence quand les utilisateurs auront compris qu’ils leur facilitent ce travail par exception.

Portrait

François Maes est directeur de projet SI Supply Chain pour Parfums Christian Dior. Son périmètre de responsabilité s’étend également sur Guerlain, Dior, Givenchy et Kenzo. Il a animé en 2019 une étude de cadrage sur les besoins métiers, fonctionnels et systèmes d’information associés, impliquant 150 personnes pour définir une feuille de route sur cinq ans, en termes de cartographie applicative, de choix de solution. Il dirige le programme sur son versant métier et travaille avec un binôme pour le versant IT.