Stratégie supply

Rexel : « Nous avons enclenché un cercle vertueux alimenté par la finesse de la donnée »


Philippe Brion, chef de projet transport de Rexel France, détaille les outils avec lesquels il pilote la performance de la cinquantaine de transporteurs avec lesquels travaille le groupe. Des outils de pilotage qu’il vient de renforcer avec l’implémentation de Sightness, qui lui permet de donner aux clients du groupe des informations très précises sur l’empreinte carbone de leurs colis.

Philippe Brion, chef de projet transport Rexel France. - © D.R.
Philippe Brion, chef de projet transport Rexel France. - © D.R.

Pouvez-vous décrire le schéma transport de Rexel ?

La première dimension du transport chez Rexel est incarnée par la traction, depuis nos huit plateformes logistiques vers nos 450 agences. Chaque nuit 180 semi-remorques livrent ainsi nos agences en sas et sur des plateformes de messagerie du dernier kilomètre. Nous travaillons avec une plateforme partenaire par département au minimum. La deuxième dimension de notre activité transport concerne les déplacements depuis ces plateformes vers nos clients. Nous assurons 12 000 livraisons par jour, soit près de trois millions de livraisons à l’année chez nos clients ou sur leur chantier.

En quoi la gestion du transport est-elle un point stratégique chez Rexel ?

C’est la colonne vertébrale de notre métier de distributeur. Nous gérons un budget annuel de plus de 80 millions d’euros de transport. Il y a une vingtaine d’années, le groupe s’est démarqué en étant le premier à mettre en place des plateformes centrales disposant d’une grande profondeur et largeur de stock et un service de livraison J+1.

Notre schéma de transport est très court et très réactif

Notre schéma de transport est très court et très réactif. Toute commande saisie dans les systèmes Rexel avant 18 heures est préparée le jour même et 20 heures pour l’Ile de France, expédiée aux alentours de 22 h 30 depuis nos entrepôts pour être livrée avant 6 h 30 dans n’importe quelle agence Rexel ou avant 13 heures à l’adresse du client ou sur son chantier.

Quel est le profil des entreprises de transport avec lesquelles vous travaillez ?

Nous travaillons au total avec un peu moins de cinquante transporteurs. Sur la partie traction de nuit, nous travaillons avec un panel de six transporteurs, des sociétés telles que Jacky Perrenot, Altrans, groupe Berto, Mauffrey, ou encore GT Solutions. Nous sommes mono-transporteur sur chaque dépôt. Sur la partie distribution du dernier kilomètre, nous travaillons beaucoup avec des messagers nationaux : Geodis France Express, Heppner, ou encore Cogepart. Nous travaillons aussi avec des entreprises régionales ou locales.

Quels indicateurs de performance suivez-vous ?

Nous challengeons tous nos transporteurs sur une mesure d’OTIF (On Time In Full) calculée automatiquement en temps réel grâce à des outils fondés sur les retours EDI des transporteurs. Nous suivons cet indicateur sur un outil de BI développé en interne sur lesquels nous connectons les données de livraisons et sur lesquels nous mesurons la performance de livraison. Cet outil nous permet d’animer nos relations avec nos transporteurs et de communiquer en direct avec eux sur leur performance. Grâce à un contrat que nous venons de passer avec Sightness, nous mesurons aussi leur empreinte environnementale.

Comment fonctionne Sightness ?

L’outil produit le calcul environnemental de chacune de nos expéditions automatiquement et le restitue directement dans notre TMS. L’outil calcule une estimation de consommation de CO2 à partir d’un faisceau d’informations : le point de départ, le point d’arrivée, le kilométrage, le transporteur, le type de traction et le type de carburation. Afin que le calcul produit par Sigthness soit précis, nous auditons l’ensemble de nos transporteurs au moins deux fois par an pour mettre à jour leurs informations.

Nous sommes capables de communiquer à nos clients un bilan carbone personnalisé et détaillé au colis prêt

Valorisez-vous, dans les activités de Rexel, les informations sur l’empreinte CO2 du transport ?

Nos clients sont de plus en plus demandeurs d’un bilan environnemental précis de leurs activités. Nous segmentons l’ensemble de notre flux carbone pour le réaffecter à chaque client et nous sommes capables de communiquer à nos clients un bilan carbone personnalisé et détaillé au colis prêt, reflet de son activité avec Rexel. Nous pouvons aussi lui indiquer des axes d’amélioration, en modifiant leur comportement d’achat et leur de choix de livraison. Nous avons enclenché un cercle vertueux alimenté par la finesse de la donnée.

Comment procédiez-vous avant d’avoir implémenté Sightness ?

Lorsque nous avons attaqué ce sujet avec nos transporteurs, il y a six ans, ceux qui étaient capables de nous fournir de la donnée le faisaient à partir de la donnée issue de systèmes disparates avec chacun leur mode de calcul. Cette donnée n’était donc pas du tout homogène et très chronophage à collecter. Nous en avons conclu que, si nous voulions pouvoir produire un reporting, nous devions nous doter d’un outil qui viendrait calculer à la place des transporteurs.

Quelles clauses environnementales avez-vous introduites dans vos appels d’offres transports ?

Sur la partie traction de nos transports qui mobilise des semi-remorques sur parcs dédiés à Rexel, nous mettons en place des carburants alternatifs. Depuis six mois, 100 % de nos activités de traction de nuit sont en biocarburant. Nous testons aussi de premiers véhicules électriques.

Sur la partie dernier kilomètre, notre objectif consiste à pousser au maximum des moyens alternatifs mais nous devons rester pragmatique parce que les moyens dont disposent nos partenaires transport ne sont pas les mêmes partout sur le territoire. Des transporteurs basés dans des départements ruraux qui circulent avec des VL de 14 m3 ou 20 m3 ont très peu accès à du biodiesel ou du biogaz. Leur volume d’activité ne leur permet pas de s’équiper d’une cuve et la solution électrique est encore très limitée en termes d’autonomie.

Notre objectif est d’avoir un transport 100 % en carburations alternatives sur toutes les localités françaises sur lesquelles des ZFE étaient prévues à l’horizon 2030. C’est déjà le cas dans Paris intra-muros et une grande partie de la petite couronne. Et plus globalement nous visons 35 % de nos livraison dernier kilomètre avec des moyens alternatifs d’ici 2030.