Stratégie supply

Galliance : « Un jumeau numérique pour ne plus passer à côté de pistes d’optimisation majeures »

Par Guillaume Trecan | Le | Industrie

Gérôme Bassot, le directeur supply chain du spécialiste des produits à base de volaille Galliance (groupe Terrena), explique les enjeux du jumeau numérique de la supply chain qu’il est en train de développer avec l’outil Colivri de CRC Services. Un outil qui doit lui permettre de passer d’un pilotage en réaction à un pilotage en anticipation.

Gérôme Bassot, directeur supply chain de Galliance. - © D.R.
Gérôme Bassot, directeur supply chain de Galliance. - © D.R.

Quels sont les moyens de la supply chain de Galliance ?

Galliance est une filiale de la coopérative Terrena spécialisée dans la volaille et les produits à base de volaille, crus ou cuits. Nous réalisons près d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires avec quatorze sites de production en France. Je suis membre du codir et je pilote une équipe supply chain qui comprend une soixantaine de personnes réparties entre la prévision des ventes, la planification, le transport et l’industrie.

Nous livrons près de la moitié de nos commandes en A pour A avec parfois moins de 2h de latitude entre la tombée de commande de clients et l’expédition

Nos transports sont à 100 % externalisés. C’est aussi le cas du stockage et de la préparation de commandes pour tous les produits à température dirigée négative (avec Sofrilog), contrairement aux produits à température dirigée positive dont nous souhaitons conserver la maîtrise jusqu’à leur expédition. Plusieurs particularités rendent en effet ces activités difficilement sous-traitables. Nous sommes multisites et nous livrons près de la moitié de nos commandes en A pour A avec parfois moins de 2h de latitude entre la tombée de commande de clients et l’expédition. En outre, nos volailles vendues en GMS le sont en poids variable, nous posons donc nous-mêmes les étiquettes avec le prix de vente consommateur pour le compte de nos clients.

Qui sont vos clients ?

Nous vendons environ 200 000 tonnes par an, pour moitié en GMS ; un tiers en consommation hors domicile, avec des grossistes, des artisans bouchers, des collectivités et des chaines de restauration ; 15 % en BtoB, notamment pour des fabricants de sandwich et de salades ; et le solde à l’export.

Sachant que nos produits doivent être vendus sous 24 à 48 heures, cela nécessite un haut niveau de planification, d’anticipation des ventes et une agilité commerciale suffisante

Quelles sont les grandes attentes de la direction générale de Galliance à l’égard de la supply chain ?

Le premier enjeu inhérent à notre métier est l’équilibre matière. Contrairement à d’autres industries agroalimentaires, nous partons d’un produit - une volaille entière - que nous désassemblons en plusieurs morceaux. Tout l’enjeu de notre travail avec les équipes commerciales et les équipes industrielles consiste donc à réussir à vendre tous ces morceaux. Sachant que nos produits doivent être vendus sous 24 à 48 heures, cela nécessite un haut niveau de planification, d’anticipation des ventes et une agilité commerciale suffisante pour réguler au jour le jour les écarts entre les volumes de ventes de chaque morceau.

La combinaison de notre grand nombre de sites de production et la rigueur de nos créneaux de livraison rendent par ailleurs nos flux particulièrement complexes. Nous devons répondre aux attentes du client par rapport à son schéma logistique, tout en tenant compte des contraintes de nos sites : l’ordonnancement de l’abattoir, la préparation de commandes et le temps d’expédition. Cela implique de tenir une mécanique d’orchestration des flux assez fine. Tous ces paramètres ne peuvent pas être combinés sur un simple tableau Excel. La création d’un jumeau numérique de notre supply chain sur laquelle nous travaillons actuellement doit nous permettre de mieux gérer cette complexité.

Quelle solution avez-vous retenue ?

Nous avons été séduits par la solution Colivri de CRC Services qui nous avait été recommandée et nous avons choisi de commencer par la tester sous forme de POC sur un périmètre circonscrit. Nous fonctionnons par itération, afin de s’assurer que les solutions proposées par l’algorithme sont bien réalisables opérationnellement.

Nous sommes à présent dans une phase de développement qui consiste à adapter l’algorithme à l’ensemble des spécificités de Galliance. Nous fonctionnons en développement agile, avec une succession de sprints. C’est une phase dans laquelle nous pouvons apprécier la qualité d’écoute et la réactivité des équipes CRC Services. Nous nous sommes donnés jusque fin 2023 pour achever ce développement.

L’ensemble de ces informations n’étaient pas natives dans notre système d’informations. Nous avons donc dû reconstruire une base de données

Avez-vous rencontré des difficultés pour consolider les données qui alimentent ce jumeau numérique ? 

Pour disposer de l’essentiel des données, nous devions nous assurer d’une part que nous tracions bien les différentes étapes de décomposition du flux, d’autre part que les données concernant le schéma logistique du client étaient exactes et enfin que nous avions une bonne connaissance du temps de préparation de commandes de nos sites. L’ensemble de ces informations n’étaient pas natives dans notre système d’informations. Nous avons donc dû reconstruire une base de données.

Nous avons dédié un alternant à ce sujet qui y a consacré près de trois semaines. L’enjeu, maintenant, est de maintenir cette base de données. Nous avons conservé cet alternant dans nos équipes comme chargé de mission sur ce projet. La validité de ces données est essentielle pour la qualité du résultat que nous allons sortir. En étudiant les pistes d’optimisation proposées par Colivri, nous avons enrichi la base de données d’un certain nombre de paramètres, jusqu’à ce que nous soyons convaincus que les solutions proposées étaient réalisables.

Quels bénéfices attendez-vous de cet outil ?

Nous avons voulu mettre en place ce jumeau numérique pour ne plus passer à côté de pistes d’optimisation majeures de notre supply chain. Faute d’être capables de combiner tous les paramètres de notre supply chain, nous avions tendance à reprendre les schémas existant en les ajustant à la marge, sans remettre en cause les organisations. Il va également nous permettre de capitaliser sur le savoir que détiennent sur nos flux nos collaborateurs expérimentés, afin de le pérenniser et de le transmettre aux nouvelles recrues. Enfin, nous allons pouvoir simuler rapidement des changements d’organisation sur nos flux logistiques consécutifs aux résultats d’appels d’offres sur telle ou telle région. Ces simulations peuvent aussi nous être particulièrement précieuses pour modéliser les différentes propositions tarifaires d’un transporteur dans nos réponses aux appels d’offres.

En définitive, à l’issue du POC, non seulement nous nous attendons à des économies significatives liées à la réduction de nos coûts de transport, mais cet outil va aussi faire évoluer les profils de la supply chain. Nos équipes vont avoir plus de temps pour effectuer des études, anticiper pour optimiser la performance, plutôt que de gérer les aléas du quotidien.

Equipe Supply

La supply chain comprend une soixantaine de personnes. Une équipe de prévision des ventes, estime les commandes clients à six à douze mois en s’appuyant sur le logiciel FuturMaster ; une équipe de planification, spécialisée par espèces et par métiers, commande les volailles aux groupements amont issus de la coopérative à partir des prévisions de ventes ; une équipe transport réalise un plan de transport faisant le lien entre les sites de production et les clients. La supply chain comprend également la partie industrielle avec l’ordonnancement et la production.