Avec son Hub Circulaire, Manutan pense inclusion et supply chain circulaire
Le groupe Manutan a inauguré le mercredi 15 octobre 2025, au sein de son Hub Circulaire au Bourget (93), une activité d’insertion professionnelle qui concentre ses efforts sur le reconditionnement de mobilier de bureau. En partenariat avec ARES et Valdelia, cette initiative renforce la dimension sociale de son entrepôt. Le groupe, lui, inscrit plus que jamais la logistique du réemploi au cœur de sa stratégie d’entreprise.

Inauguré en juin 2024 avec le soutien de la Région Île-de-France, avec à la clé une subvention de 75 000 euros, le Hub Circulaire du groupe Manutan, qui s’étend sur 3 000 m² au Bourget (93), dans un quartier prioritaire de la ville et non loin de son d’un entrepôt historique situé à Gonesse, a fêté ses un an. L’entrepôt, flambant neuf, qui a réclamé un investissement total d’environ un million d’euros, a in fine vocation à jouer un rôle central dans la chaîne logistique du réemploi, axe différenciant sur lequel le groupe Manutan - plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires au compteur - appuie de plus en plus. Sourcing, collecte, tri, nettoyage, réparation, contrôle qualité, puis remise sur le marché … Le groupe a développé une véritable boucle d’économie circulaire qui porte peu à peu ses fruits.
Depuis l’ouverture du Hub, quelque 3 000 produits sont collectés en moyenne par mois, et entre 300 et 1 000 articles y sont reconditionnés pour être réemployés. Cette activité, qui vise à moyen terme la rentabilité, a pris du poids en très peu de temps. Mais elle a encore des marges de manœuvre et beaucoup de choses à accomplir pour changer la donne. « Aujourd’hui, plus de 90 % du mobilier dont se sépare une entreprise ou une collectivité en France n’est pas réemployé », nous explique Pierre-Emmanuel Saint Esprit, directeur économie circulaire du groupe.
Le groupe, qui entend donc accélérer le pas, vient d’officialiser, ce mercredi 15 octobre, une activité d’insertion professionnelle au sein de son Hub Circulaire en partenariat avec le groupe ARES - acteur de premier plan de l’insertion par l’activité économique créé en 1991 - et l’éco-organisme Valdelia. Quatre salariés en parcours d’insertion, en plus de la quinzaine de salariés Manutan, ont déjà intégré l’atelier de réparation et de reconditionnement, sous la supervision d’un chef d’équipe chargé du pilotage opérationnel et du contrôle qualité. Objectif : donner une seconde vie aux bureaux, chaises, vestiaires et armoires collectés, tout en offrant à ces salariés un véritable tremplin. Un beau clin d’œil quand on sait notamment que le réemploi s’est développé en France en grande partie grâce à l’économie sociale et solidaire, depuis Emmaüs, en passant par le réseau des ressourceries et des recycleries. « Nous sommes convaincus par l’économie circulaire, parce qu’elle épouse les enjeux de l’insertion. Les deux se complètent parfaitement », explique Pierre-Olivier Brial, directeur général. L’enjeu, pour le groupe Manutan, dépasse largement l’emploi et le réemploi ; l’idée étant de permettre à des personnes de goûter à un métier d’avenir, liés au savoir-faire de la réparation et du réemploi, des filières stratégiques pour une économie durable.
Sortir de l’économie linéaire …
Bien plus qu’un simple Poc, le Hub Circulaire vient d’obtenir le niveau « Maîtrise » du programme « Vérifié par » le FCBA, qui atteste de la fiabilité et de la performance des processus de reconditionnement. Cette reconnaissance vient souligner la structuration progressive d’une supply chain circulaire, en mesure de répondre aux exigences croissantes en matière de durabilité et de conformité réglementaire. Il faut dire que le groupe Manutan s’est emparé du sujet il y a de nombreuses années désormais. Il ne fait aujourd’hui qu’accélérer la cadence. L’offre de seconde main de l’entreprise déployée progressivement dans ses 17 pays en Europe et déjà disponible sur ses sites internet français, belge, néerlandais et très bientôt italien.
L’économie circulaire doit être une industrie de grands volumes et un lieu d’intégration, d’insertion sociale. Il nous faut construire ce modèle collectivement pour qu’il soit extrêmement fort »
Le mobilier usagé traité au sein du Hub Circulaire est sourcé essentiellement en France. L’Hexagone représente en effet 95 % de ses approvisionnements. Et pour Manutan, le sourcing est le nerf de la guerre. Et pour cause, la principale difficulté du marché de la seconde main consiste à accéder à des gisements qualitatifs et quantitatifs. La quantité a évidemment son importance, car lisser les coûts de collecte sur vingt pièces ou sur plusieurs centaines n’est en rien similaire. L’objectif est simple : passer à l’échelle et monter en cadence. « L’économie circulaire doit être une industrie de grands volumes et un lieu d’intégration, d’insertion sociale. Il nous faut construire ce modèle collectivement pour qu’il soit extrêmement fort », soutient notamment le directeur général du groupe Manutan. « Sur le mobilier, les possibilités sont immenses, avec un peu plus de 5 % du mobilier réemployé, nous avons de quoi s’améliorer en France », estime de son côté Pierre-Emmanuel Saint Esprit. Quant à la qualité, elle est un facteur clé de réussite presque aussi important puisque reconditionner du mobilier en bon état ou de marque est plus facile et donc moins coûteux. « Il faut investir et passer à l’échelle, poursuit Pierre-Emmanuel Saint Esprit. Des acteurs doivent émerger, construire des infrastructures … ».
… en pensant une supply chain circulaire
Nous pouvons également acheter du mobilier, reconditionnés ou non, à d’autres acteurs. Cela permet de faire vivre la filière, de l’aider à se structurer et nous, nous pouvons compter sur des volumes plus importants
Le groupe Manutan a de son côté développé de nombreuses sources d’approvisionnement, notamment à La Défense. Ces sources, ce sont des entreprises qui souhaitent le plus souvent voir leur mobilier être récupéré dans le cadre d’un réaménagement de leurs bureaux. « Nous pouvons également acheter du mobilier, reconditionnés ou non, à d’autres acteurs. Cela permet de faire vivre la filière, de l’aider à se structurer et nous, nous pouvons compter sur des volumes plus importants », complète le directeur de l’économie circulaire du groupe.
Outre la collecte et le reconditionnement, qui inclut donc le diagnostic, le nettoyage et le référencement, le transport, externalisé lui, représente un poste de coûts non négligeable. Mais le jeu en vaut la chandelle. À l’inverse de brokers, le groupe Manutan gère l’ensemble du mobilier client. L’entreprise opère sur place le tri des produits entre ceux qui sont captés pour son Hub. Ainsi, les produits placés dans son cœur de cible ont vocation à être commercialisés tandis que d’autres, qui peuvent avoir une valeur marchande pour des partenaires de revalorisation, sont destinés aux dons associatifs ou alors au recyclage. « Cela peut concerner des espaces de vie, des canapés et d’autres biens qui n’entrent pas dans nos catégories prioritaires, mais aussi des produits que nous ne possédons pas en quantité suffisante et sur lesquels les risques de rupture sont plus importants », détaille Pierre-Emmanuel Saint Esprit. Ainsi, Manutan scinde les flux entre les produits qui peuvent être réemployés et qui seront transportés vers son Hub Circulaire et ceux qui ne le seront pas. En somme, au-delà du seul reconditionnement, Manutan espère faire de ce modèle un pilier de sa stratégie logistique. Son approche intégrée, combinant économie de ressources, innovation et responsabilité sociale, en témoigne.
La première étape du reconditionnement, elle, commence ainsi dès le diagnostic d’entrée. En fonction de critères esthétiques et fonctionnels, le groupe attribue au produit un grade, déterminant son cycle de vie dans notre Hub : nettoyage puis mise en stock, ou bien réparation, commande d’une pièce de rechange voire transformation au préalable. Le reconditionné désigne à la fin des produits 100 % fonctionnels, lesquels peuvent présenter des traces d’usure plus ou moins marquées. Vient derrière l’étape du référencement, particulièrement décisive. Mais référencer un produit de seconde main n’a rien d’évident. Pour améliorer ses opérations en la matière, le groupe cherche à identifier des gisements importants pour optimiser la charge de travail liée au référencement.
De plus en plus d’entreprises et collectivités séduites
Les commandes mixtes représentent le gros de nos volumes
Globalement, plus de 700 entreprises et collectivités, nouveaux clients, ont déjà choisi du mobilier issu de cette filière, à des prix jusqu’à 30 % inférieurs au neuf. Si l’on compte les commandes mixtes - mobiliers neufs et reconditionnés - beaucoup plus se sont laissé conquérir par cette nouvelle offre. « Les commandes mixtes représentent le gros de nos volumes », fait savoir Pierre-Olivier Brial. « Une vingtaine de camions sortent chaque jour de notre Hub Circulaire », précise en complément Pierre-Emmanuel Saint Esprit. En comparaison, le groupe organise une voire deux collectes par semaine. « À plein régime, nous pensons pouvoir expédier 50 camions et gérer un projet sur le temps long par semaine pour un client qui souhaite repenser ses espaces de travail en intégrant du mobilier reconditionné. »
Le groupe Manutan croit en l’économie circulaire et pas qu’un peu. L’entreprise est intimement convaincue que c’est le modèle économique et opérationnel vertueux de demain. Ce Hub Circulaire constitue un investissement pour l’avenir. Et dans un monde où les contraintes d’approvisionnement sont de plus en plus fortes, le groupe a la conviction que, dans quelques années, ces gisements seront davantage valorisés. En prenant ce sujet en main dès maintenant, le distributeur espère le maîtriser avant la concurrence.
D’ailleurs, Pierre-Emmanuel Saint Esprit rappelle que le groupe n’est pas parti d’un business plan visant à démontrer la rentabilité du modèle dès la première année, ni forcément au cours de la seconde. Qu’importe pour le moment, le groupe a plutôt fait le choix (et le pari) de penser une cellule d’innovation chargée de construire un modèle économique viable basé sur l’économie circulaire. Et les premiers résultats sont plus qu’encourageants. Prochaine étape : améliorer le cadencement de l’activité, trouver un moyen de pallier les ruptures lorsque plusieurs commandes tombent au même moment, peaufiner l’activité de reconditionnement et développer des outils informatiques plus solides qui répondent aux enjeux de l’économie circulaire, trop peu pris en compte par les WMS du marché pour le moment. « Beaucoup de briques ne sont malheureusement pas intégrées. Pour avoir un système de référencement en entrée et en sortie, nous nous sommes appuyés sur un outil de traçabilité et avons engagé des développements sauvages. Nous voulons professionnaliser ce pan, à travers un outil dédié à la reverse », confirme Pierre-Emmanuel Saint Esprit.