Logistique

A Roissy Kuehne+Nagel veut doubler ses capacités dans le fret aérien

Par Guillaume Trecan | Le | Logisticien

Le logisticien Kuehne+Nagel vient de lancer le chantier de construction d’une nouvelle plateforme logistique de 12 600 m2 sur la zone aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle, un doublement de sa surface logistique qui augure un doublement de ses volumes traités.

Guillaume Péard président France Maghreb et Francis Seuront, directeur de l’aérien de Kuehne+Nagel. - © D.R.
Guillaume Péard président France Maghreb et Francis Seuront, directeur de l’aérien de Kuehne+Nagel. - © D.R.

Fruit de deux ans d’approche, ce chantier de construction devrait aboutir, au quatrième trimestre 2023, à la construction d’un entrepôt de 12 600 m2, sur un seul niveau, dont 800 m2 de bureaux, où travailleront 260 personnes. Cet effectif ne comprend pas les intérimaires, mais tient compte, en revanche, des équipes de Quick International Courier, la filiale de Kuehne+Nagel dédiée au transport urgent, actuellement basées à Villepinte.

Située juste en face de l’actuelle base logistique de Kuehne+Nagel à Roissy, ce nouvel entrepôt bénéficiera des mêmes facilités d’accès, en bord de piste, et présentera l’avantage d’être entièrement dédiée à son activité, contrairement aux 5 000 m2 qu’occupe actuellement Kuehne+Nagel à Roissy, situés dans un bâtiment partagé.

La deuxième plateforme aéroportuaire en Europe

Grâce à cette nouvelle surface logistique, Kuehne+Nagel va disposer de sa deuxième plateforme logistique aéroportuaire la plus importante en Europe. La première est celle de 30 000 m2 dont le groupe dispose sur l’aéroport de Francfort (20 000 m2 avant Covid), qui lui sert de base d’organisation pour le fret aérien sur l’Europe. La future plateforme de Roissy aura également un rôle important, puisqu’elle doit devenir un hub multi produits sur lequel Kuehne+Nagel pourra optimiser le chargement de son fret aérien.

En ayant plus de volumes à traiter, nous disposerons de leviers supplémentaires pour densifier des liaisons directes en import et en export

« En ayant plus de volumes à traiter, nous disposerons de leviers supplémentaires pour densifier des liaisons directes en import et en export », explique le président France Maghreb de Kuehne+Nagel, Guillaume Péard. L’objectif de ce nouveau développement à Roissy est en effet de densifier les chargements, d’améliorer les leadtime et, bien sûr, d’améliorer la compétitivité. Les 12 600 m2 de Kuehne+Nagel à Roissy complètent un dispositif d’entrepôts de fret aérien - tous loués - à Lyon, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Lille, Strasbourg et Marseille.

60 000 tonnes de produits par an, à doubler

Actuellement, Kuehne+Nagel traite à Roissy 60 000 tonnes de produits par an, dont 60 % de produits pharmaceutiques et 40 % de produits secs. A l’avenir, le doublement de ces volumes traités passera aussi par des produits de luxe, de la high-tech et des pièces détachées pour l’aéronautique.

Autant dire que le logisticien ne doute pas de la croissance du fret aérien. « Nos partenaires s’intéressent d’ailleurs de plus en plus aux avions cargos. Les carnets de commandes de Boeing ou d’Airbus sur le tout cargo sont de plus en plus pleins », note Guillaume Péard. Autre preuve de sa confiance dans la croissance du fret aérien, Kuehne+Nagel a reçu en novembre le premier de ses deux Boeing 747 qui voleront à ses couleurs, en leasing avec Atlas Air.

Guillaume Péard : « Constituer, au départ de Roissy, plus de lignes directes vers d’autres zones »

Guillaume Péard, président France Maghreb. - © D.R.
Guillaume Péard, président France Maghreb. - © D.R.

Qu’est-ce que ce nouvel entrepôt va apporter à votre activité de gestion du fret aérien ?

La stratégie poursuivie depuis longtemps par Kuehne+Nagel sur l’aérien consistait à développer des spécialités par secteurs d’activité, dont la pharmacie. C’est un secteur sur lequel il existe beaucoup de spécificités, dont le fait d’être en températures dirigées. Pour continuer à nous développer sur ce secteur, nous devions nous agrandir. Ce bâtiment va aussi nous permettre d’être plus à l’aise sur le luxe, un autre secteur en forte croissance, dont les contraintes sécuritaires sont également importantes. Kuehne+Nagel a aussi un savoir-faire particulier dans le traitement des pièces de rechange aéronautiques, de même que les produits high-tech.

Au-delà de cette stratégie, nous voulons nous développer sur le General Cargo pour l’import ou l’export, ce qui nécessite de la place. Ce nouveau bâtiment pourra devenir un hub pour constituer, au départ de Roissy, plus de lignes directes vers d’autres zones géographiques mondiales.

Quels volumes de marchandises traitez-vous depuis Roissy ?

Nous traitons 60 000 tonnes à l’année, et ce bâtiment est un outil de développement pour parvenir à doubler ce volume à terme. Nous sommes entrés dans un monde très incertain, je ne peux donc pas préciser si cela se fera en un an ou plus.

Justement, comment les développements de vos systèmes d’information, vous permettent-ils d’accroître votre capacité à gérer la volatilité ?

Cette question de la maîtrise des données figure en effet au cœur de la stratégie que le nouveau PDG du groupe, Stefan Paul, va présenter au premier trimestre 2023. Le fait que nous soyons un logisticien et un transporteur aérien, maritime et route nous amène à traiter des millions de données chaque année. L’agrégation de ces données avec de l’intelligence artificielle, peut apporter de la prédictibilité. C’est une préoccupation majeure de Kuehne+Nagel. Superposer les flux physiques et les flux d’information est un besoin fondamental dans notre métier et une demande importante de nos clients.

Dans un contexte où tous les chargeurs affichent de grandes ambitions en matière de décarbonation, quelle confiance avez-vous dans la croissance du trafic de fret aérien ?

C’est un sujet que nous avons pris en compte dans notre gouvernance en créant l’an dernier un comité RSE, avec une personne dédiée à ces sujets. L’aérien est évidemment un mode de transport polluant, nous avons donc lancé des tests sur le SAF, avec Lufthansa, Air France KLM et American Airlines. Chaque fois qu’il sera possible d’avoir des initiatives concrètes du SAF avec nos partenaires compagnies aériennes, nous le ferons. Reste la question de savoir si les volumes de SAF disponibles seront suffisants pour décarboner petit à petit le transport aérien.

L’usage du transport aérien restera un impératif pour beaucoup d’activités et répond à des besoins ponctuels pour des marchés sous tension, tels que les semi-conducteurs ou la pharmacie. A l’inverse, à l’export, beaucoup des produits de luxe continueront à être transportés par de l’aérien. Mais il est vrai que le bon usage de l’aérien sera de plus en plus recherché, en fonction de l’activité, du poids, de la valeur de la marchandise. Charge à nous, Freight Forwarder, d’accompagner nos clients dans le recours aux bons modes de transport. Nous en avons donné un bon exemple l’an dernier en ayant recours à des combinés air-mer, lorsqu’il était si difficile d’avoir des capacités en maritime. La force c’est l’hybride.