Stratégie supply

Les outils de Leroy Merlin pour optimiser son transport

Par Mehdi Arhab | Le | Retail

La direction transport du distributeur Leroy Merlin a entrepris un vaste programme de décarbonation de ses opérations. Une action sur le temps long et entamée il y a de cela six ans avec l’arrivée de Nicolas Davril à la tête du département. Le tout se traduit aujourd’hui par des résultats prometteurs. Mais sans l’appui de ses partenaires et l’aide d’outils digitaux, rien de cela n’aurait été possible.

Les outils de Leroy Merlin pour optimiser son transport
Les outils de Leroy Merlin pour optimiser son transport

Certains l’oublient peut-être : le e-commerce constitue une (petite) révolution de taille, aussi bien pour le consommateur que les enseignes de grande distribution. Il est toujours bon de le rappeler et Nicolas Davril, directeur transport du groupe Leroy Merlin depuis six ans, après quinze années passées à la direction Transport de Carrefour, est bien placé pour le savoir. Le distributeur spécialisé dans les produits d’habitat est finalement un symbole de la montée en puissance du e-commerce, d’une logistique multicanale aussi et également d’une nécessité : celle de la traçabilité poussée à son paroxysme. 

De plus en plus de flux sont au départ de nos entrepôts et fournisseurs vers nos clients finaux. Il nous faut avec ce nouveau schéma chercher de la profitabilité

« Depuis mon arrivée, nous avons ajusté notre organisation logistique pour répondre au besoin du e-commerce, une activité qui ne cesse de prendre de l’ampleur, en témoigne la croissance des commandes passées sur notre site internet depuis quelques années. De plus en plus de flux sont au départ de nos entrepôts et fournisseurs vers nos clients finaux. Il nous faut avec ce nouveau schéma chercher de la profitabilité ; néanmoins, en sponsorisant le coût de la livraison, nous faisons face à un danger. Nous devons donc être vigilant et chercher de l’efficience », rappelle-t-il.

Un budget transport important pour un volume de flux qui l’est tout autant

Couvrant la supply chain amont pour la zone Europe ainsi que la supply chain aval, la direction transport de Leroy Merlin gère chaque année près de 5 millions de palettes et 1 100 camions par jour. Elle disposait sur l’année 2022 d’un budget de 120 millions d’euros et assure pour ses 140 magasins français plus de 115 000 livraisons chaque année. Compte tenu des flux conséquents à opérer, l’optimisation de la performance des transports du groupe était en 2016 le principal objectif fixé par Leroy Merlin pour sa direction dédiée. À cela s’ajoutait une autre ambition : réduire ses émissions de gaz à effet de serre. 

Pour ce faire, Nicolas Davril a notamment tâché avec ses équipes d’améliorer la traçabilité des livraisons de ses magasins, en s’appuyant sur un TMS et un portail porté par Shippeo. Elle s’offre aujourd’hui une plus grande visibilité sur la localisation et les heures estimées d’arrivée des produits commandés. L’enseigne a ensuite largement revu l’organisation du transport amont des flux fournisseurs vers ses entrepôts afin de diminuer les délais de livraison et améliorer la qualité de son service. 

« Il y a six ans, nous n’avions aucun outil à notre disposition pour gérer l’exploitation. Il était donc nécessaire d’investir. Le virage de la digitalisation a débuté il y a cinq ans, avec la mise en place du TMS Oracle, de la solution de tracking Shippeo, de reverse Opalean, de Docusign par la gestion des contrats et de E-attestation pour le suivi administratif de nos documents. Depuis trois ans, nous avons déployé la solution Sightness pour nos dashboard performance puis carbone. Auparavant, le groupe concentrait ses investissements sur la rénovation et l’extension de ses magasins, désormais en majorité sur la supply et la digitalisation », relate Nicolas Davril

Le digital pour piloter les opérations transports rigoureusement 

Comme précisé ci-dessus, pour solidifier son socle, Leroy Merlin a opté pour Sightness, une solution SaaS d’analytique transport portée par BP2R permettant de détecter différentes anomalies transport, aussi bien sur les coûts que la qualité de service ou les émissions de gaz à effet de serre là aussi. Grâce aux fonctionnalités - tableaux de bord dynamiques, indicateurs 3D - de la solution, la direction transport de Leroy Merlin pilote de manière plus précise toutes ses opérations - en amont et aval, gagnant par la même occasion en visibilité sur sa rentabilité. De plus, elle lui permet de maîtriser, via de multiples indicateurs, ses coûts et ses volumes transportés ainsi que ses émissions de GES. 

« Le transport est un enjeu de compétitivité certain pour les entreprises, car il représente un poste de coût non négligeable et est un vecteur d’émissions carbone important. C’est un élément majeur de la satisfaction client et clé de la fiabilisation du chiffre d’affaires d’une organisation. Il est donc nécessaire d’en mesurer la performance, mais la data est difficile à maîtriser, car multi sources et fragmentée », note Arthur Auclair, directeur commercial de Sightness. 

Ainsi, la direction transport réussit désormais à limiter le kilométrage à vide des véhicules en proposant des flux (aval) et contre flux (amont). Aussi, elle profite d’une data produit certifiée. « Sur le e-commerce, les écarts de données relatifs au poids ou à la taille des produits sont monnaie courante et impactent directement le mauvais choix transporteur en cas de gros écart. Sightness devait en premier lieu répondre à cette problématique », retrace le directeur transport du groupe, qui poursuit, fort satisfait : « la solution se distingue par son ergonomie et son côté ludique ».  

Des partenariats solides et énergies alternatives variés

Signataire de la charte Fret 21 depuis 2017, Leroy Merlin s’était engagé à réduire dans les trois ans de 15 % ses émissions carbones liées au transport, soit une réduction de plus de 10 000 tonnes de CO2. Un objectif finalement dépassé, puisque le groupe revendiquait fin 2019 une diminution de son empreinte carbone liée au transport de 19 %, soit -13 000 tonnes de CO2. À la fin de l’année 2022, le distributeur affirme avoir réduit ses émissions carbones depuis 2017 de 36 % et devrait même les réduire de 50 % pour fin 2023. 

Nicolas Davril, directeur transport du groupe Leroy Merlin - © D.R.
Nicolas Davril, directeur transport du groupe Leroy Merlin - © D.R.

Une trajectoire rendue en grande partie possible grâce aux relations partenariales voulues par Nicolas Davril. En effet, le directeur transport juge préférable de réaliser des appels d’offres tous les trois ans - et non chaque année - afin de laisser à ses 140 transporteurs le temps d’investir et d’optimiser leurs schémas. « Nous choisissons des transporteurs vertueux et engagés. Plus de 90 % d’entre eux sont chartés ou labellisés Objectif CO2 », explique Nicolas Davril. 

Aujourd’hui, près de 15 % de l’activité transport de Leroy Merlin est réalisée sur rail-route pour tous les axes jugés comme longue distance ; cela lui permettant de baisser de 80 % ses émissions carbone sur ce type de trajet. Pour renforcer encore ses actions et sa trajectoire, le groupe a fait le choix de miser sur différentes typologies d’énergie alternative. Le biométhane, utilisé sur des axes courte distance, pèse pour 23 % de l’activté. Les énergies B100 et XTL, privilégiées sur des trajets moyennes et longues distances, pèsent respectivement pour 20 % et 12 %. À ce jour, 70 % des volumes transportés par Leroy Merlin le sont via des énergies alternatives, contre 40 % en 2020. « Nous visons 100 % d’énergies alternatives à l’horizon 2025 », poursuit Nicolas Davril.

Un soutien indéfectible à ses partenaires

Pour y parvenir, la direction transport de Leroy Merlin devra tout de même augmenter la proportion d’énergies alternatives sur la partie amont de ses flux, entres autres les flux Européens. Dans nos colonnes déjà, Nicolas Davril indiquait que le groupe utilisait pour le moment « environ 35 % d’énergies alternatives », espérant « atteindre 50 % en 2023 ». Si elle soutient ses transporteurs dans leurs actions et investissements en matériel, la direction transport doit malgré tout assumer un surcoût non négligeable, compris entre 20 et 30 % sur le biométhane. Une difficulté due en partie à la guerre en Ukraine et ses conséquences sur le marché de l’énergie.

« Nous demandons à nos partenaires de se positionner avec des motorisations alternatives et de s’engager dans des démarches écoresponsables. De fait, nous devons les soutenir et les appuyer. Dès lors qu’un transporteur propose une énergie alternative sur une ligne, nous le privilégions sur la ligne au détriment des énergies fossiles », assure Nicolas Davril.