Transport

XPO Logistics : « Les volumes transportés par notre barge représentent 10 000 camions en moins »

Par Guillaume Trecan | Le | Multimodal

Bruno Kloeckner, directeur général d’XPO Logistics France présente le retour sur expérience du transport combiné fluvial et camions au gaz mis en place pour Franprix. Un projet dont le ROI évolue d’autant plus favorablement que s’accroissent les tensions sur le transport routier et qu’approche l’échéance de la ZFE.

Bruno Kloeckner, directeur général d’XPO Logistics France. - © D.R.
Bruno Kloeckner, directeur général d’XPO Logistics France. - © D.R.

Comment fonctionne la plateforme multimodale fleuve route que vous opérez pour Franprix en plein Paris ?

Tous les magasins Franprix passent leurs commandes à j-2. Ils sont 300 sur les 500 Franprix de Paris. A j-1, les commandes partent de Chennevières-sur-Marne et font les 15 kilomètres qui les séparent du port de Bonneuil-sur-Marne avec sept camions Euro6. La barge charge à Bonneuil-sur-Marne jusqu’à 15 heures. Elle a une capacité de 48 caisses et en charge 44. A 16 heures, elle part et est à quai au port de la Bourdonnais à 19 heures. Elle reste à quai de 13 heures à 5 heures du matin, pendant que le port est ouvert au public, puis les opérations de déchargement démarrent et les marchandises sont livrées par des camions avant midi, par six semis porte-conteneurs roulant au gaz et quatre porteurs thermiques qui vont être changés. Ce programme est réglé comme une horloge et d’une très grande régularité.

Nous devons nous présenter comme un fournisseur de solutions multi-énergies

L’augmentation actuelle des cours du gaz ne rend-elle pas plus difficile à assumer l’option gaz que vous avez choisie pour les camions qui viennent charger au port de la Bourdonnais ?

Si l’on regarde la décarbonation dans la perspective des enjeux climatiques, il est évident qu’il faut continuer. Le gaz fait partie des énergies qui nous permettent de décarboner et de faire face à la disparition du gazole. Chez XPO, nous étions à un rythme de 2,5 % d’émissions en moins par an et dans la trajectoire que nous avons définie pour les trois prochaines années nous accélérons et passons à -5 % par an. Pour atteindre ces objectifs, il nous faudra combiner de l’électrique, du gaz, du HVO, du B100… Nous devons nous présenter comme un fournisseur de solutions multi-énergies. Nos bureaux d’études doivent analyser les flux de nos clients et adapter l’énergie en fonction de leurs besoins.

Quels sont les atouts de cette solution multimodale ?

Elle réunit énormément d’avantages. Elle répond aux enjeux de décarbonation et à la nécessité de décongestionner les routes. Les volumes transportés par notre barge représentent 10 000 camions en moins par an et 500 000 kilomètres économisés. Cette solution apporte en outre des gains en termes de qualité de la livraison. Il n’y a jamais de rupture de chaîne, sauf en cas de crue… et encore, lors des crues, nous transportons encore trente containers par jour.

Ce projet multimodal apporte non seulement la garantie d’être livré à l’heure, mais il offre aussi un moyen de réserver des capacités de transport

Enfin, ce projet multimodal apporte non seulement la garantie d’être livré à l’heure, mais il offre aussi un moyen de réserver des capacités de transport. Face aux tensions sur le métier du transport, nous incitons nos clients à contractualiser dans ce sens plutôt que de faire appel à de l’affrètement. Le transport spot, sous-traité, représente encore la moitié de notre activité mais a tendance à se réduire. Pour sécuriser ses flux dans la perspective de la mise en place des ZFE, les capacités se réservent aujourd’hui. En effet, si l’on considère qu’un camion acheté aujourd’hui ne sera livré que dans un an, l’échéance des ZFE en 2024, c’est demain.

Malheureusement, le modèle pionnier de Franprix n’a pas été reproduit jusqu’ici. Pourquoi ?

Ce modèle a du mal à décoller du fait de son coût. La moyenne d’une palette s’élève aujourd’hui à un peu plus de quinze euros. Sur ce modèle, nous sommes à plus de 20 euros la palette, en comprenant tous les frais d’exploitation : bateau, camion, caisses… Un de nos défis aujourd’hui consiste à le faire évoluer en évitant que les caisses repartent à vide. Il y a plus de marchandises qui entrent dans Paris que de marchandises qui en sortent. Mais nous devons pouvoir trouver des marchandises sortantes suffisamment propres pour entrer dans des caisses destinées à contenir de l’alimentaire.

Nous venons d’ouvrir un projet sur les bords du Rhône pour l’un de nos plus grands clients

Avez-vous d’autres projets en cours ?

Nous venons d’ouvrir un projet sur les bords du Rhône pour l’un de nos plus grands clients. Nous travaillons aussi avec deux clients sur un projet multimodal dans le cadre duquel nous rechargerions c’est un dossier qui devrait aboutir bientôt, sur lequel nous travaillons depuis plus d’un an et qui reste difficile à faire avancer au regard du nombre d’acteurs à aligner. Nous avons identifié des zones sur le fleuve qui pourraient être aménageables, mais il faut redémarrer un projet comme celui-ci de A à Z.

Un projet multimodal prend beaucoup de temps. Entre la première discussion et le lancement de ce projet avec Franprix, il nous a fallu deux ans. En plus de Franprix et XPO, ce projet a réuni autour de la table la mairie de Paris, Haropa, VNF, les Terminaux de Seine (manutention), Paris Terminal, la Scat (le bateau).

Quelle typologie d’entreprises est intéressée par ce mode de transport ?

Ce sont principalement le retail, le retail spécialisé, la grande distribution et en province les grands chargeurs de la construction et du BTP et les grands industriels.