Solutions et techno

Galliance : « L’IA est l’outil ad hoc pour intégrer un maximum de contraintes »


Gérôme Bassot, directeur supply chain du groupe Galliance (Père Dodu, Douce France, Nature de France, Volailles champenoises, etc.) fait le bilan des gains retirés de l’application d’un jumeau numérique à son plan de transport, effectif depuis un an. Il sera grand témoin sur les Supply Days des 16 et 17 octobre à Deauville sur l’atelier-débat : « #Jumeau numérique : utiliser l’IA pour optimiser des schémas complexes ».

Gérôme Bassot, directeur supply chain de Galliance. - © D.R.
Gérôme Bassot, directeur supply chain de Galliance. - © D.R.

Après deux ans d’exploitation de votre jumeau numérique Weenlo quel bilan tirez-vous ?

L’IA est l’outil ad hoc pour intégrer un maximum de contraintes et nous aider dans la prise de décision. Weenlo nous a permis de modéliser l’ensemble des contraintes opérationnelles et d’aller au-delà de ce qu’un cerveau humain peut faire avec Excel. Nous avons pu digitaliser nos flux de transport et nos contraintes d’exploitation. Le délai entre l’horaire de tombée d’une commande et l’horaire de mise à disposition des commandes sur nos sites est très court, nous sommes en flux hypertendu. Nous avons également pu intégrer deux paramètres dans ce schéma complexe : les différentes grilles des transporteurs et les émissions de gaz à effet de serre. Chaque simulation est traduite en impact euro et gaz à effet de serre.

Le cerveau humain a une tendance naturelle à reconduire les schémas préexistants. Nous avons des a priori qui brident notre capacité à explorer des hypothèses

Ces nouveaux usages ont-ils déjà généré des gains ?

Oui. Ces gains viennent en premier lieu de la remise en cause des schémas existants du fait de notre capacité à modéliser les flux facilement. Le cerveau humain a une tendance naturelle à reconduire les schémas préexistants. Nous avons des a priori qui brident notre capacité à explorer des hypothèses. L’outil nous fait des propositions d’optimisation que nous n’aurions pas envisagées. Par exemple des combinaisons d’entrepôts de clients GMS pour nos livraisons en région parisienne que nous n’aurions pas cru possibles, ou encore l’affectation de camions dédiés à des clients, beaucoup plus rentables que du groupage dégroupage.

Nous nous servons aussi désormais de l’outil dans le cadre de nos appels d’offres transport. Nous établissons un plan de transport optimisé. Nous devons être capables de reconfigurer notre réseau de transport et de distribution en fonction des fluctuations de nos parts de marché. Nous confrontons donc la réponse des transporteurs au plan de transport optimisé que nous suggère Weenlo. Cela nous permet de classer les transporteurs les mieux-disants. L’outil nous apporte une grande réactivité dans la traduction de leurs réponses en coûts par flux ou à par kilo de matières transportées. Nous allons beaucoup plus vite dans le traitement d’un appel d’offres.

Nous tirons un autre gain de l’IA qui n’est pas d’ordre financier : cet outil renforce l’intérêt du métier de la personne chargée d’optimiser les plans de transport. Son rôle consiste désormais à traiter de la data pour traduire les contraintes opérationnelles et les scénarios dans l’outil afin de les modéliser.

Aviez-vous mené un travail particulier sur votre data au préalable pour pouvoir implémenter un tel outil ?

Le fait d’être doté d’un TMS a facilité son intégration, tous les référentiels clients et logistiques étant déjà disponibles dans notre système d’information. Nous passons moins de temps à acquérir de la donnée. Nous passons toutefois beaucoup de temps à la retravailler pour corriger des erreurs de paramétrage, avoir de la donnée complète. Nous utilisons le temps que Weenlo nous fait gagner dans l’optimisation du plan de transport et dans le travail sur un schéma directeur logistique.

Ce jumeau numérique va-t-il vous permettre de remettre en cause plus souvent vos schéma directeur logistique ?

Notre schéma est défini par des implantations industrielles en France établies dans la durée, un mix client et un réseau commercial qui évoluent peu, ou seulement à la marge, en fonction des parts de marché que nous sommes susceptibles de gagner.

Le fait que vous ayez adopté cet outil basé sur de l’IA est-il un stimulant pour impulser une modernisation des SI du groupe ?

Weenlo nous permet de partager avec mes pairs du comité de direction, des sujets complexes de manière simple et graphique. Cet atout pédagogique apporte de l’attrait aux métiers de la logistique pour des personnes qui ne la considèrent que comme un mal nécessaire. Cela permet aussi de montrer toute l’intelligence mise en place par les équipes logistique et leurs compétences investies dans la recherche de gains et dans la capacité à aider les commerciaux à répondre aux attentes de leurs clients.

Ce qui nous ralentit dans la mise en œuvre, ce n’est tant l’outil lui-même ou son acceptation en interne que la capacité de notre organisation à bouger ses lignes

Comment s’est établi la confiance des utilisateurs à l’égard des propositions émises par l’IA ?

Pour gagner la confiance de nos experts internes, nous nous sommes servis d’un POC dans le cadre duquel nous avons fait évoluer le modèle de schéma de transport initialement proposé. Les utilisateurs ont été associés à la définition du modèle de données, à l’expression des éléments à prendre en compte dans le modèle pour que ce qu’il délivre soit pertinent. Grâce à ce POC, les experts ont aussi pu confirmer que l’hypothèse de 9 % de gains avancée par Weenlo était réaliste.

Ce qui nous ralentit dans la mise en œuvre, ce n’est tant l’outil lui-même ou son acceptation en interne que la capacité de notre organisation à bouger ses lignes. Par respect pour nos partenaires logistiques transporteurs, nous ne pouvons pas du jour au lendemain remanier nos flux.