Transport

Logistique sous température dirigée : optimiser sans sacrifier le produit


Sous l’effet des tensions capacitaires et du réchauffement, les logisticiens réexaminent leurs schémas sous température dirigée. Cinq questions clés ont structuré l’atelier-débat des Supply Days des 16 et 17 octobre 2025 à Deauville : sur‑qualité, climat, collaboration Qualité/R&D, gestion des interfaces et retour au bon sens.

Logistique sous température dirigée : optimiser sans sacrifier le produit
Logistique sous température dirigée : optimiser sans sacrifier le produit

Les trois points clés du débat

Définir des corridors de tolérance validés par la Qualité et la R&D plutôt que généraliser la TD.

Agir sur les interfaces  : temps, trajets, matériels passifs et créneaux adaptés aux périodes chaudes.

Mesurer et mutualiser  : traceurs, consolidation et, si possible, groupements avec tiers de confiance.

Lire l’interview d’Anne-Cécile Portier

Y a-t-il une marge de sur‑qualité dans votre logistique à température dirigée ?

Dès l’ouverture, le débat pointe des pratiques de sur-qualité héritées d’une culture produit indiscutable en particulier dans l’agroalimentaire. Les participants cherchent un cadre rationnel, fondé sur le risque réel.

«  Nous avons appliqué la même exigence de froid à des produits qui n’en avaient pas besoin  ; la massification a parfois poussé à la sur‑qualité.  »

«  La sur‑qualité n’est pas de la qualité  : c’est de l’inefficacité qui coûte, sans bénéfice produit.  »

«  Démontrer, données à l’appui, qu’une livraison en ambiant sur 24 heures reste sûre permet d’éviter des bascules inutiles vers la TD.  »

Le réchauffement climatique fait monter la pression sur la logistique

La contrainte climatique bouscule les standards et impose des parades opérationnelles et environnementales.

«  Le mois de juin est devenu critique  : même les entrepôts peinent à tenir 25 °C, d’où des excursions plus fréquentes.  »

«  L’impact carbone d’un camion frigorifique est réel  ; à iso‑périmètre, nous observons en moyenne +20  % de consommation.  »

«  Sur l’international, une palette exposée au tarmac peut monter à 60-70 °C  ; il faut des couvertures isothermes et des plans d’exception.  »

Levier collaboration interne : Qualité et R&D pour définir le corridor de tolérance

La preuve scientifique devient l’alternative crédible au dogme ; elle ouvre des marges d’optimisation.

«  Avec la Qualité, nous avons documenté des plages d’excursion sans impact  ; cela a évité une migration massive en TD (température dirigée).  »

«  Deux ans de travail avec la Qualité ont montré qu’un produit sensible pouvait voyager en ambiant sans dégrader le bénéfice client.  »

«  Passer du dogme au risque maîtrisé suppose des analyses de stabilité, pas des slogans  ; il faut des pharmaciens et de la R&D autour de la table.  »

Levier de la gestion des interfaces et des ruptures de charge

La performance se joue dans les interfaces : moins de ruptures, plus de maîtrise des temps et des capacités.

«  La messagerie TD multiplie les hubs et l’aléa ; contrôler délais de déchargement et créneaux réduit le risque plus sûrement que “mettre un frigo”.  »

«  Des remorques isothermes passives, combinées à des parcours de nuit, offrent une inertie utile quand la durée est maîtrisée.  »

«  Le vrai sujet est capacitaire  : sécuriser des moyens utilisables seulement l’été exige des accords avec les transporteurs et, parfois, entre industriels.  »

Levier : connaissance du terrain et bon sens

Retour au terrain : mesurer, simplifier, mutualiser. Le bon sens s’appuie sur des faits et une gouvernance adaptée.

«  Instrumentons le réel  : des traceurs pour prouver qu’un flux régional livré en trois heures ne subit pas d’effet thermique notable.  »

«  Pour les petits clients diffus, mieux vaut consolider, choisir les bons jours et éviter les attentes à quai en période chaude.  »

«  Des GIE de transport ont permis jusqu’à 30  % d’économies en mutualisant des saisonnalités complémentaires, via un tiers de confiance.  »