Stratégie supply

Le plan de marche de Septodont pour abaisser l’empreinte carbone de ses livraisons


Le groupe familial français Septodont, leader mondial des produits destinés à l’anesthésie dentaire, rejoint le dispositif Fret21, avec un engagement : réduire de 16 % d’ici trois ans les émissions de CO2 liées à son transport de marchandises. Avec l’aide du cabinet Citwell, plusieurs leviers ont été identifiés et sont en train d’être actionnés.

Septodont Audrey Cosperec et Loïc Allanos. - © D.R.
Septodont Audrey Cosperec et Loïc Allanos. - © D.R.

Du haut de ses 441 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024, réalisé avec 2 400 collaborateurs, l’ETI familiale française Septodont s’affiche comme le leader mondial des produits destinés à l’anesthésie dentaire (anesthésiants et dispositifs d’administration). Son activité industrielle s’appuie sur plusieurs usines réparties dans le monde, avec deux bases principales : la France (Saint-Maur-des Fossés et Mazamet) et le Canada. Trois usines, plus modestes, sont par ailleurs implantées au Brésil pour deux d’entre elles et en Inde.

Depuis la France et sa plateforme logistique (en propre) de Croissy-Beaubourg en région parisienne où sont stockés et expédiés l’ensemble des produits fabriqués par les deux usines françaises, 120 tonnes de produits ont été distribuées en 2024 via des solutions de messagerie pour livrer directement les clients dentistes français, 900 tonnes via du fret maritime, 300 tonnes par du transport aérien et environ 1 500 tonnes par du fret routier. Hormis la France, ces flux sont dirigés vers les Etats-Unis pour des références spécifiques que ne peut desservir l’usine canadienne, l’Amérique du Sud, l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie. Ce sont à ces flux-là, que l’industriel presque centenaire a décidé de s’attaquer pour lancer son opération commando sur les émissions CO2 de ses transports.

Notre objectif est plus ambitieux, en visant, d’ici trois ans, les -16 % de CO2 sur nos transports de marchandises vers nos clients et ce malgré l’augmentation prévue de nos volumes de vente

Un objectif de -16 % d’ici trois ans

Pour certifier sa démarche, Septodont a choisi d’adhérer au programme Fret21, un programme exigeant destiné aux chargeurs, pour lequel les participants doivent s’engager sur des objectifs précis. « L’adhésion à Fret21 nécessite un engagement d’au moins 5 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Notre objectif est plus ambitieux, en visant, d’ici trois ans, les -16 % de CO2 sur nos transports de marchandises vers nos clients et ce malgré l’augmentation prévue de nos volumes de vente. Cette ambition est forte, cela démontre également notre volonté de décarboner l’ensemble de notre chaine de valeur et d’être au rendez-vous fixé par les Accords de Paris. Fret21 est une initiative de référence. C’est aussi un gage de crédibilité par rapport à nos parties prenantes », explique Loïc Allanos, directeur RSE de Septodont. « Comme beaucoup d’industriels, notre Scope 3 représente l’essentiel de nos émissions de CO2 mais l’abaissement de ces émissions est beaucoup plus complexe à atteindre car cela ne dépend pas que de nous. Un plan d’action global est donc nécessaire pour embarquer avec nous nos prestataires et fournisseurs et clients ».

Cet objectif de -16 % n’a évidemment pas été fixé au doigt mouillé, il est le résultat d’un travail de plusieurs mois mené avec le cabinet Citwell. « Le travail a commencé en mars 2024. Nous avons d’abord réalisé un diagnostic afin d’établir un calcul de référence basé sur l’année 2023. Nous avons ensuite animé des réunions exploratoires incluant la direction Supply Chain et la direction Customer Operation, deux services centraux dans cette stratégie », raconte Audrey Cosperec, manager chez Citwell. « Nous avons étudié de nombreuses pistes, dont certaines moins communes comme les expéditions par le rail et par des cargos voiliers. Mais dans le cas de Septodont, pour lesquels de nombreuses expéditions nécessitent de la température dirigée, certaines de ces solutions sur le marché ne sont pas encore satisfaisantes ou déployées à grande échelle. Ces solutions ont été écartées mais nous avons convenu de rester en alerte sur ce sujet et de surveiller les opportunités », continue l’experte de Citwell.

En revanche, d’autres leviers intéressants de décarbonation ont été identifiés et validés pour une mise en œuvre à court terme.

Plusieurs leviers de décarbonation des transports

Le premier concerne la réduction drastique du transport aérien, avec une cible à -75 %, hors urgence marché. « C’est une part réduite de nos flux, environ 300 tonnes, mais qui est fortement génératrice d’émissions de CO2, il s’agit donc d’un axe prioritaire », indique le directeur RSE.

Il s’agit d’échanger et de convaincre les clients de faire autrement. Beaucoup n’ont pas besoin d’être livrés en urgence mais ils ont parfois pris cette habitude

Comment ? Essentiellement en sensibilisant les clients (des grossistes en majorité), car ce sont eux qui paient le transport, et choisissent le mode d’expédition. « Notre service client est au cœur de cette bataille, il s’agit d’échanger et de convaincre les clients de faire autrement. Beaucoup n’ont pas besoin d’être livrés en urgence mais ils ont parfois pris cette habitude. Dans certains cas, il peut s’agir de commandes urgentes. Sur ce besoin, nous ne pourrons pas le faire disparaître complètement mais l’enjeu est bien qu’il y en ait le moins possible désormais ». Là-encore, il s’agit de sensibiliser les clients à anticiper afin de rendre possible du transport maritime par exemple. Une incitation au regroupement de commandes devra aussi permettre de basculer de l’aérien vers d’autres modes de transports, comme le maritime, parfois inaccessible pour des trop petits volumes.

Le deuxième levier majeur concerne le fret routier. Il s’agit de modifier les calendriers d’expédition en Europe en réduisant le nombre de départs afin d’optimiser les taux de chargement des camions. Cette nouvelle manière de procéder se double d’un travail avec les transporteurs prestataires autour de leurs efforts de décarbonation : certifications environnementales, déploiement de flotte bas carbone etc. « Cela va prendre du temps car les flottes ne sont aujourd’hui pas encore prêtes. Nous allons intégrer dans nos prochains appels d’offres ce critère, mais pour l’instant, il ne représentera pas un critère absolument déterminant de choix », précise Loïc Allanos.

Dans cet engagement, l’impact organisationnel de la supply chain (dirigée par Jean-Yves Doré pour le groupe) n’est pas significatif. En revanche, la planification des expéditions a dû être revue, et continuera d’évoluer.

Démarche globale

Ce travail réalisé dans le cadre de Fret21 s’inscrit dans le lignée d’une démarche RSE plus globale de Septodont concernant l’ensemble de l’entreprise et des Scopes pour s’aligner sur les attendus des Accords de Paris. L’entreprise entend ainsi réduire de 50 % ses émissions entre 2022 et 2032 pour ses scopes 1 et 2. Des investissements industriels ont été réalisés en ce sens.